Jean Vilar, fondateur du Festival d'Avignon

Vilar, premier acte d'une révolution culturelle

Une histoire vécue comme les flux et les reflux d'une mer se fracassant sur un roc, dont la résistance est sans cesse mise à l'épreuve. Un matériau omniprésent chez Jean Vilar, né à Sète en 1912, au sein d'une famille modeste, laïque qui défend les valeurs républicaines. Il grandit au milieu de la littérature classique que son père autodidacte affectionne.


Il quitte sa région en 1932 et monte à Paris pour achever ses études littéraires ; parallèlement il est surveillant dans un collège. Sa passion pour la philosophie - Montesquieu, Rousseau, Diderot… - participe à ses réflexions politiques dans un pays en pleine crise.


L'aventure lui permet d'assister à une répétition de Richard III, orchestrée par le metteur en scène Charles Dullin à l'Atelier Théâtre. Un instant décisif dans sa vie puisqu'il s'inscrit à ses cours d'art dramatique. Il devient second régisseur et apparait pour la première fois, comme figurant dans "le Faiseur" de Honoré de Balzac - 1935.


A propos de Charles Dullin :

 "… j'ai compris que sans l'émotion, sans la sincérité profonde et généreuse de l'interprète, notre métier n'est rien, rien que grimace."  Jean Vilar, 1946.

Et, vingt ans plus tard  "Je lui dois le souci de la qualité, un certain goût de l'exigence…" Jean Vilar, 1965.

Des valeurs nourricières dans l'esthétique de ses mises en scène qui impactent aussi son engagement culturel.


Il est enrôlé par André Clavé en 1941 comme auteur pour sa Compagnie de la Roulotte et découvre un nouveau public lors des représentations dans les villes et villages français.

Deux ans plus tard, il crée la Compagnie des Sept, ainsi que sa première association d'abonnés. Son premier succès à double titre - metteur en scène et interprète dans le rôle de Thomas Becket - se joue au théâtre du Vieux Colombier (150 représentations) - Meurtre dans la cathédrale de T.S. Elliot, en 1945.

La même année, René Char et Christian Zervos (et sa femme Yvonne), organisateurs d'une exposition d'arts plastiques contemporaine au Palais des Papes, lui proposent de jouer à cette occasion, Meurtre dans la cathédrale.

Il décline tout d'abord considérant l'espace trop vaste et « informe », puis revient avec trois pièces peu en vogue ou méconnues du public : Richard II de William Shakespeare, Tobie et Sara de Paul Claudel et Terrasse du midi de Maurice Clavel.

Jean Vilar dans son bureau rue de l'Estrapade, Paris, 1966

Jean Vilar et Jean-Pierre Cassel, Cour d'Honneur du Palais des Papes, 1963

Jean Vilar et Dominique, sa fille en coulisses avant de jouer La Guerre De Troie

Jean Vilar, Fondateur du Festival d'Avignon

Jean Vilar, sa troupe et l'âme de Shakespeare inaugurent et prennent possession du cadre imposant et grandiose de la Cour d'Honneur du Palais. Une rencontre magique qui scelle, les noces du Théâtre et de la Cité des Papes.


Les premières années, le festival est l'œuvre d'un homme, Jean Vilar engage sa volonté militante pour diffuser vers le plus grand nombre, et en particulier vers les jeunes une culture théâtrale. 


Jeanne Moreau, Georges Wilson, Daniel Sorano, Maria Casarès et bien d'autres acteurs de la troupe portent le projet à bout de bras, assistés par les habitants qui s'investissent dans l'aventure. Les spectateurs assistent enthousiastes, à la reformulation d'un théâtre jusqu'alors confiné dans ses lieux de représentation conventionnels, pour un théâtre qui prend des risques et rencontre un public fervent et passionné.


Pour la 5e édition, Gérard Philipe rejoint la troupe et joue Le Cid de Pierre Corneille et le Prince de Hombourg de Heinrich Von Kleist en 1951. Sa popularité profite au Festival et son succès croissant réveille les pouvoirs publics plus décidés à faire place au Théâtre national populaire (TNP).


Toujours en 1951, Jeanne Laurent nomme Jean Vilar à la tête du TNP. Une nouvelle expérience qui consolide sa volonté de faire du théâtre, un service public. Il prône des tarifs accessibles au plus grand nombre, la gratuité de services et multiplie les créations de textes classiques sur fond dépouillé, français et étranger (comme Bertolt Brecht, dramaturge et poète allemand).


À l'issu une association des amis du théâtre populaire est créée et il relance la revue « Bref » enfantée par Firmin Gémier - inventeur en 1911, du théâtre national ambulant. Un autre homme engagé y participe, Antoine Vitez, qui défend l'idée, « un théâtre élitaire pour tous », tandis que Jean Vilar rêve d'un théâtre pour Tous…


À partir de 1964, Jean Vilar se consacre en priorité à la direction du Festival d'Avignon qu'il souhaite ouvrir vers d'autres formes d'expression artistiques. Il invite des metteurs en scène, inclut la danse, et le cinéma. Il inaugure de nouveaux lieux de représentation dans la ville. Pendant quatre semaines, le festival envahit la ville. Il veut faire du festival un lieu d'échange et de réflexion sur la société.


En 1968, juste après les révoltes étudiantes du mois de mai, Jean Vilar affronte une jeunesse radicale et contestataire. Il meurt le 28 mai 1971.


Paul Puaux, son fidèle ami et assistant reprend le flambeau et poursuit l'aventure d'un festival qui, plus que jamais, crée l'événement. Il ouvre la programmation vers de nouvelles formes d'expression : rencontres, cinéma, lectures, débats, créations musicales, théâtre pour enfants. Lorsque Paul Puaux démissionne en 1979 pour se consacrer à la direction de la Maison Jean Vilar, c'est la fin d'un cycle.


Son successeur, Bernard Faivre d'Arcier s'attelle à la tâche, puis Alain Crombecque entre 1985 à 1992, et de nouveau Bernard Faivre d'Arcier jusqu'en 2003.En septembre 2003, Hortense Archambault et Vincent Baudriller prennent la direction du Festival. 



© Textes : Christine Limont - chrislimont@live.fr

Remerciements à Melly Puaux de l'Association Jean Vilar qui a aidé à la rédaction du texte.

 


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